Inexistant et
invisible - Les réseaux sociaux constituent un échange de données innécessaires
par essence, car les données nécessaires ne s'échangent pas au vu de tous et
forment en soi un foyer peu commun, excluant le tiers agissant, lequel est majoritairement
incapable du moindre effort. Or, de tous les abus, nul n'est plus fréquent que
celui nourri par l'ambition vaine, que dénote la tendance à se présenter sous les
étiquettes d'"écrivain", de "poète", quand bien même il n'y
eût aucune oeuvre sur laquelle la vanité eût pu se reposer. Seules l'histoire
et la publication d'ouvrages salués par des pairs compétents pourraient justifier
de tels usages. L'époque qui nous a vu naître n'a jamais été avare en
supercheries, et celle qui consiste à appeler à soi un talent et une notoriété
par la manie de l'autodésignation, n'est pas la moins grossière. L'autorité virtuelle
de l'écrivain sans écrits et celle du poète sans poèmes s'érige sur la réalité
de l'inaccompli, la plus partagée entre toutes: mais le boulanger sans pain
serait aussitôt raillé, comme le charpentier sans bois, alors que le non-publié,
qui ne produit pas davantage, jouit d'un meilleur sort, traitant avec l'inexistant,
que la masse confond volontiers avec l'invisible, et d'autres abstractions qui
échappent à son entendement.
Etienne Milena ©
Lo inexistente y lo invisible - Las redes sociales constituyen
un intercambio de datos innecesarios por esencia, pues los datos necesarios no
se intercambian delante de todo el mundo, y forman un hogar poco común, excluyendo al tercero activo, el cual es mayoritariamente incapaz del más mínimo esfuerzo.
Ahora bien, se ha de decir que de todos los abusos, ninguno es más frecuente
que el derivado de la vana ambición, que se expresa con la tendencia de cada uno a
presentarse bajo las etiquetas de "escritor", de "poeta",
aunque no hubiera siquiera ninguna obra en la cual se pudiera reposar tal
vanidad. Solo la historia y la publicación de libros reconocidos por unos colegas del oficio podría justificar tales usos. La época que nos vio nacer nunca ha
sido escasa en imposturas, y la que consiste en inventarse un talento y una
fama por medio de la auto-designación no es la menos grosera. La autoridad
virtual del escritor sin escritos y del poeta sin poemas se erige sobre la
realidad de lo incumplido, la más compartida entre todas. Pero si el panadero es victima de mofas, al igual que el carpintero sin madera,
el no-publicado, que no produce más que estos, goza de una mejor suerte, ya que
trata con lo inexistente, que la masa confunde con lo invisible, y con otras
abstracciones que escapan totalmente a su juicio.
Etienne Milena ©